Sho Kimura, rencontre avec le talentueux chef pâtissier japonais des 3 Chocolats

Une interview en toute simplicité qui retrace le parcours d'un chef destiné à nous régaler !

Par Simone
08/04/2025

La rédaction d’Histoires Culinaires a voulu en savoir plus sur l’intriguant japonais Sho Kimura. Chef pâtissier de la boutique Les 3 Chocolats, située dans le Marais – rue Saint-Paul – à Paris, il ne cesse de nous régaler depuis que nous l’avons découvert. Son talent n’a d’égale que sa modestie. Retour sur son interview.

Interview de Sho Kimura, chef pâtissier de Les 3 Chocolats à Paris

Comment avez-vous commencé la pâtisserie ?

Sho Kimura : Mon père était pâtissier, c’est donc tout naturellement que j’ai suivi le même chemin. Au Japon, nous travaillons beaucoup. Je savais donc que le métier était très dur et physique, mais j’ai baigné dans le milieu depuis ma tendre enfance. La pâtisserie s’est imposée à moi, j’ignorais ce que je pouvais faire d’autre.

Pouvez-vous nous parler de votre histoire ?

Sho Kimura : Je suis né à Aomori. Pendant mon enfance, j’aimais beaucoup regarder mon père pâtisser et faire avec lui. A 18 ans, j’ai commencé à travailler dans une pâtisserie de ma ville natale. Ensuite, avant de venir en France, j’étais employé d’une boutique dans un centre commercial. J’ai l’impression d’avoir perdu mon temps dans cet endroit où je n’étais qu’un exécutant. Je faisais la même chose tous les jours et je me demandais si je devais continuer ou sortir de ma zone de confort.

Vous savez, au Japon, nous sommes timides et très carrés. Là-bas, nous vendons beaucoup les pâtisseries classiques françaises comme les madeleines ou les financiers. Conservateurs et historiques, nous nous inspirons pour produire ce qui existe déjà, mais nous n’inventons pas. C’est trop basé sur la technique pour moi. Je préfère la France où je peux laisser libre court à mon imagination et à ma créativité. J’y ai d’ailleurs obtenu mon CAP pâtissier en 2020 qui attestait de mon expérience.

C’est donc pour cela que vous êtes venu en France ?

Sho Kimura : oui, je voulais savoir et connaître ce que c’est la VRAIE pâtisserie française. Mais pas que. La boutique de mon père s’appelait “La France”. J’ai donc toujours rêvé de ce pays, pionnier dans l’art de la pâtisserie. De plus, pour les japonais, c’est très important d’avoir une expérience en France. Cela permet d’être bien vu.

Quelles différences constatez-vous entre la France et le Japon ?

Sho Kimura : Tout d’abord, en France tout est génial pour les pâtissiers : les matières premières par exemple. Paris, c’est le paradis, vous avez de tout, même les produits japonais. Au Japon, au contraire, certains produits ne se trouvent pas facilement.

Ce que j’aime aussi en France, c’est le respect de chacun, de tous les genres, des religions…etc Il existe une diversité des produits proposés : sans gélatine de porc, qui conviennent aux femmes enceintes, avec ou sans alcool… On fait attention à tout le monde. J’adore !

Sinon, j’ai remarqué qu’au Japon – notamment à l’époque de mon père – un gâteau bon, ça fonctionnait. Mais aujourd’hui, il faut aussi faire beau parce que les japonais adorent la beauté, le luxe et la mode. Ils scrutent sans cesse les nouveautés sur Instagram, plateforme où il est nécessaire de rester actif et montrer de belles pâtisseries pour intéresser.

Ici, la répétition et les routines restent plus appréciées. Pourtant, avec Instagram, nous devons quand même nous adapter, changer, rester dans le rythme et créer de la nouveauté tout en faisant attention à la santé, à la planète…etc Ça change à une vitesse folle et même si c’est contraignant pour nous, c’est très important.

Quelles sont vos pâtisseries françaises et japonaises préférées ?

Sho Kimura : A vrai dire, le salé me plaît plus que le sucré. Mais si j’avais à choisir, j’adore la meringue surtout en France. Au Japon, avec l’humidité, il est difficile de manger une bonne meringue parce qu’après 4h de cuisson, elle sort du four humide. J’aime donc manger des pavlova, dont celle de Yann Menguy, craquante à l’extérieur et moelleuse à l’intérieur.

Pour les plaisirs sucrés japonais, mes préférés sont le mochi ou encore le dorayaki (un pancake avec des haricots rouges sucrés). C’est d’ailleurs ma madeleine de Proust, car j’en dévorais beaucoup chez ma grand-mère, accompagné d’un thé matcha.

Quels produits aimez-vous utiliser dans vos créations ?

Sho Kimura : Pour commencer, la vanille car elle se marie avec de nombreux ingrédients différents comme le chocolat ou le caramel. J’en mets très souvent dans mes créations car elle me permet de faire de jolis pâtisseries originales à n’importe quel moment de l’année. 

Au printemps et à l’été, j’adore le yuzu aussi pour son côté à la fois acide et rond, que j’associe avec des fruits comme la framboise ou la rhubarbe. A l’automne et en hiver, je préfère des ingrédients comme la crème, le praliné ou le caramel. De belles et bonnes choses à déguster avec un délicieux thé rooibos à la châtaigne.

Comment avez-vous intégré l’équipe de la boutique Les 3 Chocolats ?

Sho Kimura : Un ami m’en a parlée. Il disait que la boutique était incroyable, alors je suis allé constater cela par moi-même. J’ai rencontré à cette occasion Emiko Sano, chocolatière et fondatrice de Les 3 Chocolats. A l’époque, elle n’y vendait que ses créations chocolatées. Un peu plus tard, elle m’a proposé de travailler avec elle. Je me suis donc demandé : où est-ce que je veux devenir le meilleur pâtissier. A Aomori ou à Paris ? J’ai très vite fait mon choix.

J’avoue, j’ai été un peu déçu en arrivant le premier jour quand j’ai vu le laboratoire. J’ai eu peur, ne sachant pas comment j’allais pouvoir m’adapter à un environnement si petit et étroit. Mais j’ai fini par trouver une solution et m’organiser pour y travailler dans de bonnes conditions

Puis, ça permet de s’adapter, de ne pas gâcher (je déteste ça !) et de faire de beaux et bons gâteaux. Je soigne les textures, les angles afin qu’ils soient jolis et la fraîcheur de mes pâtisseries. Je prépare tout à la main, tous les matins. Je n’ai presque aucun stock, aucune création n’est industrielle.

Au début, je préparais des pâtisseries 100% françaises avec des ingrédients français. Je n’utilisais pas de produits japonais. Plus tard, j’ai changé car j’avais envie de créer une pâtisserie fusion. Cela m’ouvrait le champ des possibles, j’avais plein de choix qui s’offraient à moi. Je pouvais imaginer tout ce que je voulais, c’était super.

Comment la boutique et votre travail ont-ils été remarqué ?

Sho Kimura : Au début, il y a 8 ans, les clients de Les 3 Chocolats n’étaient pas au rendez-vous. Pendant 5 ans, ils ne venaient pas et nous avons eu beaucoup de soucis pour nous imposer. Aucun commerce ne fonctionnait dans cette rue et plusieurs d’entre eux ont fermé (pizzeria, café). Les touristes visitent principalement la Rue de Rivoli qui se trouve juste à côté, mais pas la rue Saint-Paul.

Mais nous avons continué à faire de bonnes choses, nous n’avons jamais baissé les bras et nous nous sommes améliorés de mois en mois. Grâce à nos progrès et à l’expérience acquise, les clients arrivaient petit à petit et nous avons capté certains d’entre eux qui nous sont devenus fidèles.

Puis, nous avons participé à l’émission de François-Régis Gaudry, Très Très Bon. Cela a amené de nouveaux clients mais le Covid a fait son apparition et nous avons dû fermer. Heureusement, lorsque Les 3 Chocolats a ré-ouvert, les habitués revenaient et des influenceurs ont parlé de nous (Le Guide Ultime, par exemple). Lentement mais sûrement, la boutique a réussi et nous avons pu continuer à nous développer et vendre de savoureuses pâtisseries.


Être déçu par une pâtisserie de Sho Kimura ? Nous ne l’avons jamais été ! De tout ce que nous avons dégusté, nous avons certes nos préférences et même de gros coups de coeur (son vanille coco que nous aimons appeler le Rafaello ou sa tarte matcha), mais jamais de déception. Tout est beau et bon, il n’y a rien à dire. Les efforts et le travail de ce chef pâtissier talentueux se ressentent dans chacune de ses créations. Nous vous conseillons vivement d’aller le découvrir si vous ne le connaissez pas encore.

Comment s’y rendre ?

45 rue Saint Paul, 75 003 Paris

N.B. : les pâtisseries changent régulièrement, selon les envies du pâtissier, les saisons ou les événements spéciaux.


Sources :

  • Interview de Sho Kimura faite le 07/10/2024

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